Durant le mois de décembre, j’ai vu passer pas mal de publications sur les réseaux sociaux, émanant d’auteurs et autrices divers et livrant leurs rêves les plus secrets en rapport à leur métier.

Il y en avait des drôles, des doux, des attendrissants, des un poil flippants.

Il y en avait des basiques de débutants (être un jour publié dans telle ou telle maison d’édition. Ou être publié tout court, d’ailleurs). Des plus élaborés avec tout un plan de carrière idéal détaillé. Des très spécifiques ne désirant qu’une seule chose (très atteignable ou carrément utopique).

Des rêves de gloire avec paillettes, foules hurlantes et merchandising de malade.

Des tout modestes mais dont en sentait qu’ils revêtaient une importance primordiale.

Tiens, j’ai envie de me la jouer article putaclic (je fais ce que je veux, je suis chez moi ici !)

En fait, la réponse est à la fois oui et non.

J’écris depuis plusieurs décennies, même si je ne publie que depuis 2014. J’ai eu le temps de faire mon deuil de pas mal des choses dont je rêvais dans mes jeunes et naïves années :

  • la gloire d’un premier roman best-seller. D’un best-seller tout court, d’ailleurs. Vu l’état du marché du livre aujourd’hui, sans potes écumant les estaminets germanopratins, point de gloriole ni d’envoi par milliers dans les librairies de France et de Navarre. Moi je suis de la Seine-Saint-Denis, je n’y ai jamais croisé Modiano ou Sollers dans les années 70-80. Remarquez, Matzneff non plus, c’est pas plus mal finalement.
  • être invitée sur le plateau d’Apostrophes. Vu que l’émission n’existe plus et n’ayant plus la télé depuis 2005, je ne peux pas juger de l’intérêt de La grande librairie. Ma belle carrière télévisuelle a pris fin avant même d’avoir commencé. Le monde y a beaucoup perdu (l’emmerdant, c’est qu’il n’en a même pas conscience).
  • voir les droits d’un de mes romans achetés pour le ciné avant même sa parution. Bon, j’avoue que dans ma bibliographie, il y en a plusieurs dont on me dit souvent qu’ils feraient de très bons films, mais ils ne sont encore jamais tombés entre les bonnes mains ! (Steven S., if you read this, tu could finish ta carrière with a chef-d’oeuvre grâce à me. Call me and let’s discute !)
  • connaître une renommée internationale, avec mes romans traduits dans toutes les langues, y compris les langues mortes et les dialectes régionaux. Imaginez, mon roman de zombies en latin, ça aurait du panache ! Zombie cerebra plurima vorat (le zombie dévore des cervelles à foison, bande d’incultes) en rouge sang sur la couverture de Apocalypsis secundum Sandra, ça en jetterait, non ?
  • voir des files d’attente de plusieurs centaines de mètres devant les librairies ou dans les salons, rien que pour avoir une dédicace ou se faire prendre en photo avec moi. Celui-là, je lui ai bien vite tordu le cou ! J’aime bien prendre mon temps pour discuter avec mes lecteurs et je déteste faire attendre les gens. Deux traits de caractère complètement incompatibles dans ce cas précis ! En plus, je suis incapable de faire un sourire sincère sur commande, en attendant que le petit oiseau sorte (je l’ai toujours trouvée glauque, cette expression. Pas vous ? Ça fait très pédophile devant une école. « Viens voir, mon petit, le petit oiseau va sortir… »)
  • être reconnue dans la rue par des fans tétanisés par le trac ou dans l’incapacité de dire autre chose que « oh mon dieu, oh mon dieu, oh mon dieu… » Encore un rêve dont je suis revenue. Avec ma chance légendaire, ça tomberait forcément à un moment où je sors de chez le dentiste, avec les lèvres encore anesthésiées. Ça finirait dans la presse people avec une légende du type « Céline Saint-Charle bredouillante et bavouilleuse ! Le début de la fin pour la célèbre romancière aux 250 milliards de lecteurs ? » (Quoi ? On est moins que ça sur Terre ? Ah oui, j’ai oublié de préciser qu’on me lit aussi aux confins de la galaxie).
  • écumer la planète en sautant d’un jet privé à un autre, pour participer à une dédicace de deux heures avant d’aller me reposer au spa d’un palace 19 étoiles. Le moi d’aujourd’hui a bien compris que les jets c’est caca pour la Terre, que même les milliardaires font pipi dans les jacuzzis, que j’aime pas les saunas. De toute façon, je préfèrerai toujours un Airbnb sympa avec mon chéri, à bouffer des pizzas avec des potauteurs.

Si, bien sûr ! Il me reste quelques rêves d’autrice. Je veux bien vous en livrer un : qu’à chaque salon, un lecteur ou une lectrice m’apporte un paquet de Dragibus pour tenir le coup (ouais, les salons ont la particularité de faire chuter ma glycémie, pour une raison indéterminée).

Si vous voulez en savoir plus, il vous faudra venir me déclamer une ou deux lignes de L’Apocalypse selon Sandra en latin (grec ancien et sanskrit également acceptés, je ne suis pas chienne).

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